Difficile reprise

La crise sanitaire sans précédent ayant secoué et provoqué l’arrêt de nombre d’activités dans le monde entier n’aura pas épargné le domaine des transports.

Le nombre de trains, drastiquement réduit au plus fort de la crise et dès l’annonce du confinement, pour atteindre 7% des trains à grande vitesse et un total d’environ 3200 à 3500 trains par jour de semaine (contre environ 15,000 en situation nominale) et 2200 à 2500 les weekends, remonte lentement et avoisine 45% des TGV faisant partie des quelques 9000 trains qui se côtoient quotidiennement depuis cette semaine sur le réseau.

L’amorce d’un dé-confinement progressif a entériné la reprise du trafic avec une hausse du nombre de trains longue distance, régionaux et en banlieue. Tous les axes ont globalement vu une montée en puissance du trafic en passant notamment par la réouverture de certains axes. Et bien que les trafics reprennent, l’utilisation des transports reste sujette à des restrictions : port du masque, distanciation physique, désinfection de toutes le surfaces à bord des trains par du personnel dédié…

Infographie des mesures sanitaires mises en place par SNCF

Trafic international

Sur fond de fermeture des frontières Européennes, le trafic international à grande vitesse reste sur la touche.

Alors que les relations à grande vitesse reprennent avec parcimonie sur Paris > Milan, sur Paris > Bâle ou Paris > Luxembourg, les liaisons Eurostar et Thalys sont presque à l’arrêt avec deux aller/retour Paris  > Londres et un aller/retour Paris > Bruxelles.

Les mesures de quarantaine imposées outre-Manche ne vont pas dans le sens d’un retour des trafics à grande vitesse et mènent Getlink – anciennement Eurotunnel – sur une pente dangereuse (plus d’infos par ici) : les péages des trains Eurostar utilisant les infrastructures du lien fixe amenant plus des trois quarts des revenus de l’exploitant, le manque à gagner devient important ! La facture pourrait cependant avoir un goût encore plus amer bien que les trafics de poids-lourds et autres véhicules de tourisme repartent légèrement à la hausse.

En Espagne, le lancement du Low-Cost au travers de la nouvelle marque de la Renfe, Avlo, est quant à lui reporté sans aucune échéance annoncée. L’implantation de la SNCF sur des liaisons à bas coûts sous la marque Rielsfera, créée il y a peu, devrait se faire d’ici à la fin de l’année conformément au calendrier prévu.

Côté trains classiques, les trains Thello, de jour (Marseille/Nice > Milan) comme de nuit (Paris > Venise) sont supprimés au moins jusque fin juin. L’arrivée de la marque sur le segment de la grande vitesse entre Paris et Milan en concurrence frontale avec la SNCF est sans surprise suspendue et reportée à la fin d’année.

Liaisons nocturnes

Premières liaisons à être supprimées en cas de mouvement social ou de crise majeurs, les trains de nuit, délaissés par le gouvernement et la SNCF, pourtant jugées utiles à l’équilibre – notamment économique – du territoire, ne verront pas les rails cet été !

Ayant déjà subi les mouvements sociaux liés à la réforme des retraites en décembre et janvier dernier, puis annulés depuis mi-mars sur les rares liaisons encore existantes, les trains Paris > Briançon, Paris > Albi/Latour-de-Carol/Cerbère sont supprimés jusque nouvel avis au prétexte qu’il n’est pas possible d’y faire respecter les prescriptions sanitaires en vigueur. Or, ces trains qui permettent d’acheminer des touristes en période estivale, pourraient faire l’objet de tests grandeur nature en limitant le nombre de personnes par compartiment quitte à ajouter des voitures supplémentaires ! Dans l’idée, privatiser les compartiments pour des familles ou limiter à deux le nombre maximum de personnes par compartiment (une couchette haut, une couchette bas en quinconce), pourrait sauver ces liaisons utiles aux régions et vallées reculées des massifs français qui n’ont d’autre relation ferrée directe avec la capitale.

Intercités de Nuit Cerbère > Paris-Austerlitz, Septembre 2018.

De son côté, Belmond confirme la reprise de la circulation du train Venise-Simplon-Orient-Express, à bord duquel on voyage notamment de nuit, dans des wagons-lits, à partir du 8 juillet prochain ! Aucune circulation commerciale n’a eu lieu cette année alors que la saison devait s’ouvrir le 22 mars dernier avec le premier Venise – Paris – Londres. Une politique d’échange a été mise en place avec un coup de pouce généreux si l’on choisit d’anticiper un voyage au moyen d’une carte cadeau : pour 500€ dépensés, Belmond vous en offre 100 supplémentaires, et pour 1000€ dépensés, la carte est abondée de 200€.

De l’autre côté des Pyrénées, les trains nocturnes reliant Barcelone à Vigo ou A-Coruña, ne devrait pas reprendre du service tout de suite. L’idée d’une suppression définitive de ces « Trenhotels » vieillissants n’est, à présent, plus qu’une question de temps.

L’Europe en train de nuit se démocratise pourtant sous l’impulsion des chemins de fer Autrichiens OBB qui remettent sur les rails de nombreuses liaisons disparues tandis que plusieurs collectifs militent pour la réhabilitation des trains de nuit notamment sur les lignes Paris/Bruxelles > Berlin ou Amsterdam/Bruxelles > Milan/Venise pouvant marquer le pas vers l’abandon des liaisons aériennes – conscience écologique oblige !

NightJet n’opère plus que six liaisons nocturnes dont un Munich > Budapest et annonce une reprise de l’activité progressive sur d’autres lignes à partir du 26 juin. Il faudra cependant attendre le 29 pour effectuer le trajet Bruxelles > Innsbruck/Vienne dont la liaison a été inaugurée il y a six mois !

Retour de la liberté dans les transports

Le gouvernement français a présenté jeudi après-midi la seconde phase du dé-confinement au sein du pays en développant certains points liés aux transports :

  • la notion des déplacements ne devant pas excéder une distance de 100 kilomètres depuis son adresse de résidence sera supprimée à partir du 2 juin,
  • la hausse progressive (annoncée précédemment par le Secrétaire d’État aux transports) des trafics longue distance permettant d’absorber les premiers flux de vacanciers avec une montée en puissance progressive de l’offre de trains dès le 2 juin,
  • la capacité de réservation des trains qui doit être revue à la hausse, alors que les avions peuvent vendre la totalité des sièges, la SNCF se voit obligée de ne remplir ses trains qu’à 50% maximum empêchant une rentabilité concrète et entraînant la réservation obligatoire de places sur certains trains régionaux notamment dans la région Hauts-de-France.

Certains opérateurs se préparaient déjà à une reprise avant les annonces gouvernementales : Thalys prévoit deux Paris > Amsterdam, un Paris > Dortmund et trois Paris > Bruxelles supplémentaires tout comme la reprise d’IZY dès la mi-juin (chacun ayant leur retour). Eurostar ne s’avance guère : on entend que la reprise sera très lente et le service ne devrait retrouver sa situation initiale d’ici un an et garde sous le coude les liaisons estivales vers Lyon, Avignon et Marseille devant sans doute reprendre dès mi-juillet, quand Lyria reste sur ses positions en évoquant une augmentation possible des liaisons dans le courant du mois prochain.

Sur la réserve

Malgré les annonces du gouvernement, une reprise à 100% des trains nationaux sur des trajets de longue distance semble compliquée à la date du 2 juin suite à des contraintes liées aux ressources (personnel, matériel, maintenance).

Aujourd’hui, environ 40% des TGV circulent à un taux de remplissage de 45% maximum afin de respecter les distances physiques entre voyageur. La SNCF compte sur l’autorisation de vendre 100% des places à bord de ses trains, en normalisant l’obligation du port du masque et dans la mesure où l’air d’une voiture de TGV est renouvelé en 6 à 9 minutes, afin de retrouver un seul de rentabilité fixé à 60% de remplissage sur les TGV et à 80% sur les Ouigo.

Note humoristique : Le Secrétaire d’État aux Transports n’a pas manqué de rappeler que les « Buvettes » à bord des trains resteraient fermées malgré l’engagement du dé-confinement, en utilisant un vocabulaire se rapprochant davantage des football-clubs locaux qu’à des services nationaux et internationaux de transport. Aucune date de réouverture n’est fixée à ce jour.

Le transport de FRET en tête

L’activité de transport de marchandises par voie ferrée (FRET SNCF, filiales et concurrents) a résisté suite à la forte demande des entreprises alimentaires, pharmaceutiques et des autres secteurs ayant poursuivi leur activité pendant le confinement. Assurant de 65 à 80% du trafic nominal selon les jours durant les deux derniers mois, l’activité compte plus de 1100 circulations quotidiennes à ce jour tous trafics confondus (longue distance, international, dessertes locales).

Les trains SIBELIT (Sillon Belgique – Italie) et MODALOHR (transport combiné de poids-lourds sur wagons entre la Mer-du-Nord et la Méditerrannée) ne restent pas en marge et on vu leur activité reprendre après deux semaines d’accalmie sévère fin mars pour retrouver très rapidement un rythme de croisière. Certaines liaisons, notamment avec l’Italie, reprennent très progressivement.