Rouen : d’une rive à l’autre

Deux files de rail

La ligne de chemin de fer reliant Paris-St-Lazare à Rouen ouvre à partir de 1843 et fait partie intégrante du projet allant jusque la ville du Havre.

Ponctuée par nombre d’ouvrage d’arts (tunnels, viaducs, ponts…), la ligne se détache à Colombes de la ligne de Paris à St-Germain-en-Laye, puis file vers Maisons-Laffitte puis Poissy. Mantes-La-Jolie est atteinte au PK 57.2, d’où se détache aujourd’hui la ligne vers Caen et Cherbourg, puis continue vers Vernon et Sotteville avant d’atteindre Rouen-St-Sever.

Infographie personnelle – Tracé de la ligne de Paris-St-Lazare au Havre

La ligne poursuit vers le Nord via un bifurcation à partir de Sotteville et traverse la pénombre des tunnels en atteignant notamment Rouen-Rive-Droite au PK 139.4, puis continue vers Barentin et son célèbre viaduc avant d’atteindre Yvetot puis Le-Havre au PK 227.9.

Une histoire de gares

Inaugurée en 1843, la gare de Rouen-St-Sever est la principale gare de la ville. Établie en cul-de-sac, elle ne permet que la desserte du centre-ville. Les trains pour Le-Havre devraient y effectuer un tête-à-queue ou, à défaut, desservir la gare de Rouen-Rive-Droite.

Détruite lors des bombardements alliés en 1944, elle ne sera jamais totalement reconstruite, bien que des trains continuent de la desservir. Les derniers convois quittent St-Sever en 1965 avant que la gare ne soit délaissée par les voyageurs. Des trains de marchandises continuent de la franchir afin de rejoindre les quais de Seine.

Rouen-Rive-Droite, seconde des quatre gares de Rouen, est inaugurée en 1847.

Construite en tranchée entre les tunnels de St-Maur et de Beauvoisine, elle n’est alors dotée que de deux quais. Sa situation enclavée devient rapidement source de problèmes au vu de la saturation du réseau local, compte tenu des nombreux trafics de marchandises en provenance du port du Havre notamment : son extension est alors inévitable.

Les travaux de la gare actuelle, ayant débuté en 1914 ont été retardés par un éboulement, elle sera inaugurée en 1928 par le président de l’époque, M. Doumergue. La gare est aujourd’hui équipée de 6 voies à quai. Un bâtiment du plus pur style art nouveau, mêlant le bois, la fonte, le cuivre et la pierre, fait son apparition laissant notamment apparaître une tour culminant à 37 mètres où figure une horloge. En concurrence directe avec St-Sever, la gare est également surnommée Gare-de-l’Ouest.

Le métro rejoint Rouen-Rive-Droite en 1994 et un accès y est possible depuis la salle des pas perdus.

Le trafic voyageur ne cesse de croître et les problèmes du début du XXè siècle refont surface : la gare devient trop petite. Une extension est réalisée, comprenant un parking en surface, et surtout un hall supplémentaire d’où l’on peut rejoindre les voies en contrebas.

Cumulant près de 5.8 millions de voyageurs annuels, la gare est en pleine mutation alors que l’idée d’une Ligne Nouvelle plane dans l’esprit des politiques. Inscrit au schéma directeur des lignes à grande vitesse dès 1991, la desserte à grande vitesse de la Normandie n’est à ce jour toujours pas réalisée bien que plusieurs options aient vu le jour. La modernisation de la ligne existante et le renouvellement du matériel ont été privilégiés. Les trains Corail vieillissants tractés par de vaillantes BB-15000 à bout de souffle ne peuvent être reçus que sur trois voies dans leur configuration optimale à 11 voitures laissent aujourd’hui place à la modernité à l’heure où débarquent sur les rails normands les nouvelles rames Omnéo Premium, plus capacitaires.

Re-dynamiser Rouen ?

La ligne nouvelle Paris-Normandie, longtemps oubliée, largement contournée, est toujours un projet qui fait vibrer les politiques régionaux. Bien qu’elle ne doive pas voir le jour de sitôt, le projet prévoit la construction d’une gare nouvelle dans le quartier de l’ancienne gare St-Sever. Et, à l’instar de l’historique gare implantée sur la Rive-Gauche, n’a d’autre vocation que de désenclaver la Rive-Droite afin de permettre l’écoulement du trafic marchandises dont on espère l’expansion.

La création d’un tunnel sous la Seine permettra de rejoindre, depuis la gare nouvelle, la ligne menant au Havre.

Il ne reste que la gare Rive-Droite, renommée Gare de Rouen – on ne peut plus sobre – gardant les marques du passé ça-et-là, sans pour autant perdre de sa superbe ! La salle des pas perdus et ses hauts plafonds ornés fait rêver par sa grandeur tandis que la luminosité intérieure laisse le voyageur surpris. Des fresques murales rappellent l’histoire la ville, et apportent une note de couleur dans ce grand hall. Les boiseries murales des anciens guichets sont toujours en place et celles ornant le plafond de l’aile ouest viennent d’être remis en évidence pour notre plus grand bonheur. Le hall sous la dalle du parking est quant à lui plus « bas » de plafong et propose nombre de places assises permettant d’attendre l’heure de départ, mais a pour bémol de nous faire ressentir une sensation de claustrophobie. Du reste, l’ensemble est propre et même la crise du Covid-19 ne rendra pas la gare moins accueillante bien au contraire !

Un seul TGV quotidien transite par Rouen et relie Le-Havre à Marseille avec un aller Nord > Sud le matin, et un retour le soir. Le train Le-Havre <> Strasbourg n’a survécu que quelques années avant de tomber dans l’oubli. Une liaison saisonnière vers Bourg-St-Maurice est proposée grâce à la mise en place de trains des neiges, généralement soudée depuis Mantes-la-Jolie avec un train de/pour Cherbourg.

Rénovée il y a peu, l’horloge n’a pas encore retrouvé ses aiguilles, à l’image du tableau des départs, dépourvu des trains habituels, n’empêchant pas l’express pour Paris d’entrer en gare. Que dis-je, l’express … Le NOMAD !

Jusqu’à 4 gares

Outre les deux pré-citées, la ville était pourvue des gares de Rouen-Martainville et Rouen-Orléans.

La première a fonctionné de 1867 à 1980, date à laquelle la gare de Rouen-Martainville a été détruite. Elle était l’origine de la ligne Rouen > Amiens via Serqueux et Abancourt. Cette ligne est toujours en service, mais son terminus est désormais Rouen-Rive-Droite.

La seconde, comme son nom l’indique, était l’origine de la ligne de Rouen à Orléans via Louviers, Dreux, Chartres puis Voves. La section Rouen > Chartres est fermée à la circulation tandis que la ligne Chartres > Voves accueille encore un trafic voyageurs et marchandises, et la section entre Voves et Orléans est en cours de réhabilitation. Ouverte en 1883, la gare de Rouen-Orléans sera détruite en 1944 lors des bombardements. Seul un poste d’aiguillage portant la mention « Rouen-Orléans » subsiste, commandant les installations d’un faisceau de voies de service.