Un seul « Paris » : rallier Londres

Une idée vieille du XVIIè siècle

Relier le vieux continent aux Îles Britanniques a fasciné les ingénieurs et politiques depuis plusieurs siècles. Plusieurs projets sont évoqués dont la création d’un pont, mais la première idée concrète émerge en 1801 avec le projet de créer deux galeries superposées traversant la Manche (une routière, une pour les évacuations d’infiltrations d’eau). Une île artificielle serait créée au milieu afin de permettre une étape aux voyageurs. En 1833, le projet d’un tunnel ferroviaire foré dans le sous-sol naît. Il est accepté trente-quatre ans plus tard, mais sera malheureusement arrêté en 1870 à cause des guerres en cours. Plusieurs projets vont se succéder et des alternatives vont se mettre en place.

En 1926 est créé le train dénommé La Flèche d’Or. Il relie la gare de Paris-Nord à Calais-Maritime où les voyageurs pourront embarquer à bord de ferrys pour la traversée de la Manche. Une fois sur le sol britannique, ils prendront place à bord d’un train pour Londres Victoria.  La traversée se fait donc avec correspondance maritime.

Réservé exclusivement aux voyageurs fortunés pouvant se permettre un voyage en Pullman Première Classe lors du lancement, la crise financière survenant en 1929 entraînera des difficultés et imposera l’incorporation de voitures Pullman de Seconde classe dans le corps du train pour permettre sa survie.

Dès 1939, en correspondance avec la Flèche d’Or, le train sur le territoire anglais sera dénommé « Golden Arrow », composé exclusivement de voitures Pullman.

La circulation de la Flèche d’Or est interrompue pendant la Seconde Guerre Mondiale et ne reprendra qu’en 1946. Le train britannique quitte Londres à 10h30 pour que les voyageurs arrivent à Paris à 17h30. Dans le sens inverse, le train continental quitte Paris à 12h15 pour une arrivée à Londres à 19h30.

Train spécial évoquant la Flèche d’Or en 1963

L’électrification de la ligne entre Paris et Amiens permettra un gain de temps d’une heure vingt minutes environ sur le trajet. Cependant, la concurrence de l’avion aura raison du lien ferroviaire avec correspondance à partir de 1970 et le dernier voyage aura lieu le 30 septembre 1972. Les travaux d’un premier lien fixe sous la Manche débuteront en 1973, mais seront abandonnés deux ans plus tard.

Le nom « Flèche d’Or » sera par ailleurs utilisé jusqu’en 1990 pour une mission Paris <> Calais via Amiens en train classique.

L’idée d’un lien fixe est toujours d’actualité et le projet retenu suite à la consultation organisée en 1985 sera la construction d’un tunnel  dont les travaux auront lieu entre 1987 et 1993. La disparition de la Flèche d’Or laissera la place à l’Eurostar dont les premières liaisons Paris <> Londres circuleront à partir du 14 novembre 1994. La gare de Calais-Maritime sera fermée la même année et démantelée en 1996.

Un lien direct : Le Train-Ferry

À partir de 1936, un premier trajet sans correspondance est inauguré entre Paris-Nord et Londres-Victoria. Composé de trois à quatre voitures lits de type F (pour Ferry) de 9 cabines (au lieu de 11) de deux lits chacune, le train circule quotidiennement entre les deux capitales. Inspirées des voitures lits de type Y (circulant sur le continent), les type F sont adaptées au gabarit britannique.

Quatre mètres plus courtes, 20 centimètres moins hautes et moins larges que les voitures continentales, elles ont une masse de 52 tonnes et emportent un gilet de sauvetage par passager.

Night-Ferry en gare de Paris-Nord.

Elles ont également comme particularité de ne comporter qu’une seule plateforme permettant la montée et descente des voyageurs, l’autre étant occupée par la chaudière à charbon et un petit office réservé au personnel.

Arrivées à Dunkerque-Maritime, les voitures lits embarquent à bord d’un Ferry où le port a spécialement aménagé et où la continuité de la voie ferrée est réalisée. Les voitures sont attachées à des éléments fixes dans les bateaux grâce à des chaines afin d’éviter toute dérive lors de la traversée.

Un wagon-restaurant est accroché au train côté Français pour le service du Petit-Déjeuner alors qu’un service de restauration est proposé côté anglais par la Pullman Car Company jusqu’en 1962. Un wagon-restaurant standard effectuera le service de 1962 à 1977. De plus, un service de transport de marchandises est proposé grâce à des fourgons à bagages jusqu’en 1980.

Pendant la Seconde Guerre Mondiale, le service est suspendu et les voitures du Night-Ferry sont réquisitionnées par les forces d’occupation en vue d’un envahissement de l’Angleterre par l’utilisation du train. Certaines des voitures seront détruites ou perdues. D’autres sont incorporées dans les trains de la MITROPA entre l’Allemagne et les pays de l’Est jusqu’en 1980.

Le parc limité de 9 voitures au sortir du second conflit mondial permet toujours des rotations à trois voire quatre voitures par trajet.

Le parc est progressivement porté à 13 voitures, permettant des rotations à quatre voire cinq voitures par trajet. Six voitures neuves (tranche 3800 à 3805) livrées en 1945 sont exploitées sur les trains Paris <> Nice en attente de réouverture de la liaison et permettent dès lors la circulation de 6 à 7 voitures lit par train. Les véhicules de réserve sont incorporées dans le Nord-Express (Paris <> Copenhague / Stockholm / Oslo), ou dans l’Orient-Express entre Paris et Vienne.

Dès 1957, un wagon lit fait la liaison entre Londres <>  Bruxelles. À l’hiver 1967/68, un voiture directe est mise en place sur Londres <> Bâle afin de rejoindre les stations de skis par des correspondances. Rencontrant peu de succès, la liaison vers la Suisse est rapidement abandonnée.

En 1970, les voitures vieillissantes du Night-Ferry, pour certaines datant de 1936, reçoivent la livrée bleu et blanche des Trans-Euro-Night.

Le dernier Night-Ferry circulera le 1er Septembre 1980.